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Orques océan Pacifique

Les relations sociales des orques du Pacifique Nord

Les orques du Pacifique Nord sont depuis longtemps suivies avec attention par les chercheurs. Ces derniers sont ravis de l’arrivée des drones qui leur permet de progresser à pas de géant pour en apprendre chaque jour davantage sur leurs relations sociales.

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Les relations sociales des orques du Pacifique Nord en fonction de leur âge et sexe

Tout au long de leur existence, les orques vivent au sein de structures sociales complexes dans lesquelles elles nouent des amitiés étroites. Une étude intitulée « L’âge et le sexe influencent les interactions sociales, mais pas les associations, au sein d’un groupe d’orques », menée en 2021 par l’université d’Exeter et le Center for Whale Research (CWR), apporte des précisions sur les relations tissées sous l’eau.

Cette étude révèle que les orques deviennent moins socialement connectées à mesure qu’elles vieillissent. D’autre part, les résultats montrent que les orques passent plus de temps à interagir avec certains individus de leur groupe et ont tendance à favoriser ceux du même sexe et du même âge.

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« Jusqu’à présent, la recherche sur les relations sociales des orques reposait sur l’observation des cétacés lorsqu’ils faisaient surface, ainsi que sur l’enregistrement des individus qui étaient ensemble », déclare l’auteur principal, Michael Weiss, de l’université d’Exeter.

« Cependant, comme les orques résidentes restent dans les groupes sociaux dans lesquels elles sont nées, le degré de parenté des cétacés semblait être la seule chose qui expliquait leur structure sociale. L’observation à partir d’un drone nous a permis de voir des détails tels que les contacts entre les individus. Nos résultats montrent que, même au sein de ces groupes très soudés, les orques préfèrent interagir avec des individus spécifiques. C’est comme lorsque votre mère vous emmène à une fête quand vous êtes enfant : vous n’avez pas choisi la fête, mais vous pouvez toujours choisir avec qui vous allez traîner une fois sur place. »

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Les modèles de contact physique — l’une des interactions sociales mesurées par l’étude — suggèrent que les jeunes orques et les femelles jouent un rôle social central dans le groupe. Plus les orques sont âgées, plus elles restreignent leurs relations sociales.

Les relations sociales des orques filmées par le Center for Whale Research

4 ans d’observation avant de livrer les conclusions de l’enquête

La conclusion de l’analyse s’appuie sur plus de quatre décennies de données recueillies par le CWR sur les orques résidentes du Sud, une population gravement menacée dans l’océan Pacifique.

« Cette étude n’aurait pas été possible sans le travail extraordinaire réalisé par le CWR », a déclaré le professeur Darren Croft, du Centre de recherche sur le comportement animal d’Exeter. « En ajoutant des drones à notre boîte à outils, nous avons pu plonger dans la vie sociale de ces animaux comme jamais auparavant. Nous avons été étonnés de voir à quel point les orques demeurent en contact les unes avec les autres et à quel point elles sont tactiles.

Chez de nombreuses espèces, y compris l’homme, le contact physique tend à être une activité apaisante et antistress qui renforce le lien social. Nous avons également examiné les occasions où les épaulards font surface ensemble, car agir à l’unisson est un signe de liens sociaux chez de nombreuses espèces. Nous avons trouvé des parallèles fascinants entre le comportement des orques et celui d’autres mammifères. Nous sommes enthousiastes quant aux prochaines étapes de cette recherche. »

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Les amitiés sélectives des orques du Pacifique

Les chercheurs ont mesuré la vitesse à laquelle les baleines interagissent socialement en faisant surface ensemble ou en se touchant physiquement. En quantifiant ces schémas, ils ont pu montrer qu’au sein des groupes d’orques qui s’associent, les individus montrent de fortes préférences sociales pour certains individus avec qui ils nouent une amitié solide.

Plus intéressant encore, ces préférences ne reflètent pas seulement la parenté maternelle, principal moteur de la structure sociale des épaulards. Les orques préféraient interagir avec des individus du même sexe et du même âge, parfois avec des orques extérieures à leur unité familiale.

En outre, ce sont les jeunes orques et les femelles qui ont tendance à être les plus actives socialement. Cela correspond à des schémas observés chez d’autres mammifères sociaux, y compris les humains, ce qui suggère des parallèles fascinants entre des espèces éloignées sur le plan de l’évolution. Les résultats montrent également que les orques deviennent moins socialement connectées à mesure qu’elles vieillissent.

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Les conséquences des relations sociales des orques du Pacifique Nord sur la santé des animaux

« La mesure précise de ces relations constitue une étape essentielle pour comprendre comment elles contribuent à la condition physique des individus, comment elles peuvent répondre aux changements ou aux perturbations de l’environnement et, enfin, comment elles peuvent affecter la croissance ou le déclin de la population », explique Michael Weiss.

Les relations peuvent constituer une force positive, fournissant un soutien social, mais elles peuvent aussi contribuer à la transmission de maladies. Les résultats de Michael Weiss et de ses collègues suggèrent que les jeunes femelles peuvent être plus exposées aux agents pathogènes, car elles nourrissent davantage de contacts sociaux. Si c’est le cas, cela pourrait poser un problème : le nombre de jeunes femelles en âge de se reproduire est essentiel pour la croissance démographique.

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L’histoire des orques au travers de leurs cicatrices

Lorsque les épaulards résidents du Sud, au large des côtes de la Colombie-Britannique et de l’État de Washington, remontent à la surface pour respirer, ils montrent leurs nageoires dorsales pointues et leur double coloration noir et blanc emblématique que l’on appelle la tache de la selle.

En y regardant de plus près, on peut voir des marques sur leur dos lisse. Ces cicatrices sont dues à des morsures infligées lors d’escarmouches avec d’autres orques. Les chercheurs les appellent des « tooth rakes », littéralement des « râteaux de dents ».

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© University of Exeter

Une nouvelle étude intitulée « L’effet de l’âge, du sexe et de l’abondance des ressources sur les motifs des marques de râteau chez les orques résidentes (Orcinus orca) », publiée en janvier 2022, s’intéresse à ces cicatrices.

Pour les scientifiques, l’analyse des cicatrices permet d’expliquer le comportement agressif qui se joue sous la surface. En examinant l’évolution de la prévalence des cicatrices sur plusieurs décennies, ils observent comment les interactions agressives des orques changent au cours de leur vie, et commencent même à comprendre leurs causes.

Charli Grimes, chercheuse à l’université d’Exeter en Angleterre et auteur principal de cette étude, explique que les orques résidentes du Sud sont « plutôt placides et plutôt joueuses » par rapport aux autres groupes d’orques. Les scientifiques n’ont jamais vu directement qu’un seul cas d’une orque résidente du Sud attaquant une autre orque, bien que, comme en témoignent les cicatrices, ils savent que ces interactions agressives doivent se produire fréquemment sous l’eau.

Comme les observations de comportements agressifs demeurent extrêmement rares, Charli Grimes et ses collègues ont utilisé des photographies des traces en forme de râteau laissées par les dents comme méthode indirecte pour étudier l’agressivité.

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Les marques de dents en forme de râteau observées chez tous les cétacés

Les marques de dents en forme de râteau sont étudiées depuis des décennies chez d’autres espèces de cétacés, notamment les grands dauphins. Cette nouvelle étude est toutefois l’une des rares à appliquer cette méthode aux orques, et la première à l’utiliser pour étudier les épaulards résidents du Sud. Comme les marques de morsure guérissent avec le temps, les scientifiques peuvent suivre le moment où les orques accumulent de nouvelles cicatrices.

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L’étude du Center for Whale Research de Washington depuis 1976

Depuis 1976, les scientifiques du Center for Whale Research de Washington photographient les orques résidentes du Sud de la région. À l’aide d’un logiciel d’analyse de photos, Charli Grimes et son équipe ont quantifié le tissu cicatriciel porté par 167 orques différentes sur une période d’étude de 38 ans.

Ils ont constaté que les jeunes orques mâles présentaient le plus grand nombre de cicatrices récentes, un résultat qui semblait prévisible pour l’équipe, compte tenu des structures sociales des épaulards.

« Les orques résidentes du Sud ont une structure sociale matriarcale. Les jeunes cétacés s’affrontent pour établir leur place dans la hiérarchie et être les premiers à s’emparer des proies. », explique Charli Grimes.

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La surprenante proportion des morsures en fonction de l’abondance de nourriture

Comme ils disposaient d’une très grande quantité de données photographiques à analyser, les scientifiques ont pu pousser l’étude un peu plus loin. En mettant en corrélation les données relatives aux cicatrices avec les données sur l’abondance des saumons dans le temps, ils ont découvert que les changements dans la disponibilité des saumons influent sur le nombre d’agressions et de cicatrices.

Alors que Charli Grimes et ses collègues supposaient que la prévalence des morsures augmenterait lorsque le saumon est rare — lorsque les cétacés entrent en compétition pour leur nourriture préférée — ils ont en fait constaté le contraire : davantage de saumons signifie davantage de cicatrices.

L’analyse des taux de cicatrices montre que les épaulards résidents du Sud deviennent plus agressifs lorsque le saumon, leur nourriture préférée, s’avère plus abondant.

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L’explication de cette découverte contrintuitive

Charli Grimes propose une explication pour cette découverte inattendue : « En période de forte disponibilité du saumon, le réseau social des épaulards résidents du Sud est davantage interconnecté. Davantage de saumons conduit à de plus grandes agrégations d’orques, ainsi qu’à davantage d’interactions sociales. De plus, comme elles ont de l’énergie à revendre, les jeunes orques pourraient se livrer à des jeux brutaux, ce qui entraînerait davantage de cicatrices ».

Todd Robeck, chercheur en conservation à SeaWorld Parks & Entertainment, a déjà étudié le comportement agressif et les marques de dents chez les orques. Il n’a pas participé à l’étude de Charli Grimes, mais ses recherches montrent que les épaulards transients (c’est-à-dire nomades) et les orques résidentes du nord-est du Pacifique ont un modèle différent d’acquisition de cicatrices. Dans ces populations, les épaulards mâles plus âgés sont marqués par davantage de cicatrices récentes. Cela confirme, selon lui, que les différents groupes possèdent des structures sociales et des comportements très différents.

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© Center for Whale Research

« Le plus intéressant, c’est que les marques en forme de dents de râteau augmentent avec la quantité de nourriture », dit Todd Robeck. Bien que surprenante, cette tendance n’est pas totalement inédite, car de nombreux primates se montrent également moins agressifs lorsque la nourriture est rare.

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Bientôt de nouvelles études pour identifier les facteurs qui influencent l’agressivité

Dans le cadre d’études futures, la méthode d’analyse des photographies des cicatrices en forme de râteaux sera appliquée à d’autres populations d’orques, afin d’identifier les facteurs qui influencent l’agressivité.

Todd Robeck et Charli Grimes s’accordent à dire que les études comportementales comme celle-ci seraient renforcées par des séquences filmées par un drone ou sous l’eau. En suivant le comportement des orques au-delà de ce qui peut être observé à partir de photographies prises au-dessus de l’eau, les scientifiques pourraient bientôt révéler à quoi ressemble réellement le comportement agressif sous les vagues.

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Jamais de morsures graves !

Il convient cependant de pondérer les conclusions de ces études. S’il est prouvé que les orques peuvent se mordre entre elles, il ne s’agit en aucun cas de combats, mais plutôt de marques d’intimidation et parfois de jeux un peu trop brutaux.

Ces morsures ne présentent aucune gravité et ne mettent pas en jeu la vie des orques. Il ne faut donc pas comparer avec les luttes à la vie et à la mort qui ont lieu chez de très nombreuses espèces, lorsque la suprématie d’un mâle sur le groupe est remise en question par un jeune qui veut conquérir son royaume.

Nul ne sait encore si cela peut s’expliquer par le fait que les orques vivent dans des sociétés matriarcales. Dans tous les cas, elles appartiennent à une espèce pour laquelle la famille s’avère primordiale. Par ailleurs, les orques chassent en meute et se partagent ensuite le butin. Chez de nombreuses espèces, le dominant s’attribue les meilleurs morceaux, avant de laisser les restes au groupe.

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© Center for Whale Research

La vie secrètes des orques du pacifique Nord

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Suivez ce lien pour en savoir plus sur l’Orque Canada et USA : à la rencontre des résidentes du sud.

 

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Cet article comporte 2 commentaires

    1. Oui, et quand il n’y a pas assez, elles partagent. C’est assez rare dans une société pour le souligner !

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