L’écholocalisation de l’orque est essentielle pour traquer les proies et lui permettre d’être au sommet de la chaîne alimentaire. Découvrez le décryptage de ce sens extrêmement sophistiqué.
Un nouvel écotype d’orques chassant les cachalots dans le Pacifique ?
Photo de couverture de l’article : l’épaulard OCX043 © Robert L.
Dans une étude publiée en 2024, Evidence for an Oceanic Écotype of Killer Whales (Orcinus orca) in Offshore Waters of California and Oregon (Preuve de l’existence d’un écotype océanique d’orques [Orcinus orca] dans les eaux du large de la Californie et de l’Oregon), des chercheurs s’interrogent sur la découverte dans le Pacifique d’un nouvel écotype d’orques, capable de chasser les cachalots adultes.
Un écotype d’orques s’attaquant aux cachalots
Des chercheurs de l’Université de la Colombie-Britannique ont déclaré avoir identifié un nouvel écotype potentiel d’orques de haute mer chassant des cachalots, des cétacés qui comptent parmi les plus grands prédateurs de la planète. Les proies des orques sont les femelles vivant en groupe, d’une taille allant de 10 à 13 mètres de long, pour un poids avoisinant les 14 tonnes.
Dans cette étude, les chercheurs indiquent qu’un groupe de 49 orques a été observé en train de chasser des cachalots au large des côtes de la Californie et de l’Oregon. Josh McInnes, étudiant en master à l’Institut des océans et des pêches de l’UBC (University of British Columbia) et auteur principal de l’étude, explique que les orques ont été observées en train de chasser un troupeau de neuf cachalots adultes et qu’elles ont réussi par vaincre l’un d’entre eux.
La première attaque de cachalots observée sur la côte ouest des États-Unis par un groupe d’orques
C’est la première fois que des orques sont observées en train de s’attaquer à des cachalots adultes sur la côte ouest. L’étude indique que la rencontre avec les cachalots s’est produite en 1997 à environ 130 kilomètres de la côte californienne. De nombreux cachalots du groupe ont été gravement blessés et l’un d’entre eux a été tué.
« Environ 12 orques ont d’abord participé à la chasse, mais ce nombre est ensuite passé à environ 35 orques réparties sur 3 km. De petits groupes concentrés de quatre à cinq épaulards ont ciblé et attaqué au hasard des cachalots individuels “dans la rosace” », indique l’étude. La rosace fait allusion à la méthode de défense connue chez les cachalots lorsque les juvéniles sont attaqués par des orques transientes ou des globicéphales : les cétacés se rassemblent en cercle, la tête au centre et la queue pointant vers l’extérieur, formant alors une rosace au milieu de laquelle peuvent se réfugier les petits cachalots, proies désignées habituellement par les épaulards.
Le nouvel écotype d’orques vainqueur contre un cachalot adulte
« Du sang frais et une nappe de graisse animale ont été observés à la surface après l’attaque » poursuit l’étude. Elle précise qu’un des cachalots a été entraîné loin de la rosace et que plusieurs orques ont été vues en train de s’en nourrir.
Selon les chercheurs, les orques observées lors de neuf rencontres entre 1997 et 2021 pourraient appartenir à une sous-population d’orques transientes, mais pourraient aussi être considérées comme un écotype océanique unique.
L’interview de Josh McInnes sur la découverte d’un nouvel écotype d’orques chassant les cachalots dans le Pacifique
Un écotype d’orques à la poursuite de divers cétacés, mais aussi des tortues luth
Lors d’une autre rencontre survenue en 2001 à environ 350 kilomètres de la côte californienne, sept orques du même groupe ont été observées en train de se nourrir d’une tortue luth.
« Parmi les autres rencontres avec ces orques, citons l’attaque d’un cachalot pygmée, la prédation d’un éléphant de mer du Nord, d’un dauphin de Risso et d’une tortue luth, sachant qu’une adulte peut peser jusqu’à 700 kilos », a déclaré Josh McInnes.
Les scientifiques ont recueilli un grand nombre de photographies et de données lors de ces rencontres, mais ils n’ont pas pu établir de correspondance entre ces orques et les autres connues dans le nord-est du Pacifique ni les reconnaître.
Les trois écotypes d’orque du Pacifique
Josh McInnes rappelle qu’il existe trois types différents d’orques qui vivent le long de la côte de la Californie et de l’Oregon : les résidents, les transients et les hauturiers.
L’étude indique que les individus rencontrés présentaient des similitudes physiques avec les deux écotypes, transient et hauturier, mais qu’ils ne correspondaient pas parfaitement à l’un ou à l’autre.
Plus de détail sur les groupes d’orques : transient, résident ou hauturier.
Les orques victimes du squalelet féroce
Le rapport indique que les chercheurs ont pu identifier les orques comme étant peut-être un nouvel écotype en partie grâce aux cicatrices de morsure sur leur corps causées par le squalelet féroce, une espèce de requin qui vit dans les profondeurs de l’océan.
« Le squalelet féroce est un petit requin parasite. Il vit en haute mer et mord le flanc des grands animaux comme les baleines, les thons et d’autres espèces de poissons. Ces blessures sont la preuve directe que ces épaulards vivent principalement en haute mer. Pourtant ils ne ressemblent pas non plus aux autres écotypes d’épaulards hauturiers », indique Josh McInnes qui précise que presque toutes les orques portaient des cicatrices, alors qu’ils ne les ont pas vues sur d’autres écotypes orques dans la même région.
« La grande question est de savoir quelle est la place de ces orques. Nous ne le savons pas… mais ce que nous savons, c’est qu’elles constituent une population qui semble passer plus de temps en haute mer », rapporte Josh McInnes.
La découverte d’un nouvel écotype d’orques considérée comme un fait exceptionnel
Andrew Trites, de l’UBC Institute for the Oceans and Fisheries, coauteur de l’étude, a déclaré qu’il était exceptionnel de découvrir un nouvel écotype d’orques, compte tenu du temps nécessaire pour rassembler des photos et reconnaître les animaux comme étant différents des écotypes connus.
Ce nouvel écotype d’orques vit dans des régions océaniques lointaines. « Il a été aperçu dans une zone très éloignée de la côte. Nous parlons de 60 à 400 kilomètres au large », précise Josh McInnes. Cette nouvelle population d’orques pourrait donc faire partie d’un sous-écotype d’épaulards transients, mais qui résiderait beaucoup plus loin de la côte. Andrew Trites les surnomme les épaulards « océaniques ».
Les chercheurs ont également observé des différences physiques, telles que des taches sur les nageoires et la selle. Ils espèrent documenter davantage d’observations et de données du nouvel écotype d’orques afin d’étudier exactement à quel point ces orques sont différentes des autres populations documentées. « La forme de la nageoire dorsale et les taches sur leur dos sont un peu différentes. C’est ce que l’on voit souvent chez les épaulards des tropiques », explique Josh McInnes.
Un écotype d’orques difficile à étudier
« Nous n’en sommes qu’à la pointe de l’iceberg de ce que font ces orques. S’agit-il d’un seul écotype ? En existe-t-il plusieurs ? Nous n’en savons rien. Nous n’en sommes qu’au début de notre recherche et j’espère que nous pourrons bientôt les observer pour obtenir davantage d’informations », déclare Josh McInnes.
Pour leur étude, les scientifiques se sont basés, entre autres, sur les observations de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), l’agence américaine responsable de l’étude des océans et de l’atmosphère, mais aussi sur des croisières d’observation des baleines. Toutefois, entre 1997 et 2021, soit en 24 ans, ils ne les ont observés que 9 fois, d’où la difficulté d’en connaître davantage à leur sujet.
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