Une nouvelle étude sur le requin du Groenland estime que ce squale multicentenaire devrait sa longévité à un métabolisme particulièrement lent qui l’empêche de vieillir.
Ampoules de Lorenzini : gros plan sur le sixième sens du requin
Photo de couverture de l’article : requin bleu
Certains des plus grands prédateurs des océans — les requins et les raies — possèdent un sens supplémentaire qui les aide à repérer et à suivre leurs proies. Ils ont en effet la capacité de détecter les champs électriques les plus ténus, générés par tous les organismes vivants. Ce sens qui demeura longtemps incompris émane de pores disséminés sur le museau du requin, appelés ampoules de Lorenzini.
Sommaire
Stefano Lorenzini, le « père » des ampoules portant son nom
Stefano Lorenzini était un médecin et ichtyologue italien, né à Florence vers 1652. Il fut le premier à s’intéresser à ces nombreuses cavités présentes autour de la bouche des requins et des raies. Il découvrit que ces points noirs constituaient en réalité des pores et non des taches.
En 1678, Stefano Lorenzini observa des raies électriques et se focalisa sur ces étranges pores qu’il entreprit de décrire. Il établit qu’ils débouchaient sur des tubes transparents, mais n’en comprit pas l’utilité. Il faut rappeler qu’à son époque, on ne connaissait encore rien à l’électricité. Ses croquis et annotations dépeignent la structure tubulaire qui prolonge ces pores et se termine par une petite poche bulbeuse (l’ampoule) d’où émerge un nerf.
Bien qu’il n’en identifiât pas l’utilité, le médecin fut considéré comme le découvreur de ces organes qui furent baptisés « ampoules de Lorenzini » ou « ampullae of Lorenzini ». « ampulla » en latin est un dérivé de ampora avec le suffixe -ula, qui signifie « petite amphore ». Le mot servira plus tard à décrire nos ampoules électriques à la forme comparable.
Près de trois siècles pour comprendre l’usage que font les requins de l’ampoule de Lorenzini
Il fallut attendre 1960 – c’est-à-dire près de trois siècles après les premières investigations de l’ichtyologue italien – pour comprendre la capacité des ampoules de Lorenzini à agir comme des récepteurs sensibles aux champs électriques. Ce fut le biologiste britannique R. Murray qui mit en évidence le rôle de ces organes sensoriels.
Comment se présente l’ampoule de Lorenzini
Les ampoules de Lorenzini sont constituées de tubes remplis d’une sorte de gelée. Cette substance conductrice permet de transférer le potentiel électrique depuis l’ouverture du pore vers l’ampoule à la base du tube.
L’ampoule de Lorenzini étant tapissée de cellules électro-réceptrices, les différences de tension à travers la membrane de chaque ampoule provoquent alors l’activation des nerfs, qui envoient des signaux au cerveau.
Les ampoules de Lorenzini sont regroupées sous la surface de la peau où elles constituent des grappes. Elles sont disséminées de façon symétrique entre la partie gauche et la partie droite du museau du requin. La répartition des ampoules de Lorenzini, ainsi que la longueur des canaux qui les relient à la surface de la peau dépendent de l’espèce du requin.
La gelée électro-conductrice est considérée comme le matériau biologique le plus conducteur identifié jusqu’ici. L’exceptionnelle acuité des ampoules de Lorenzini constitue un véritable sixième sens pour les raies et les requins.
Ces organes sensoriels s’avèrent aussi sensibles à la température et à ses fluctuations. Les tubes faisant la jonction entre les pores et les ampoules de Lorenzini sont pourvus de récepteurs d’un autre genre, là encore d’une précision hors du commun, rendant le requin sensible au dixième de degré Celsius près.
Comment les requins et les raies utilisent les champs électriques pour trouver les proies cachées
Des chiffres à donner le vertige !
La sensibilité du sixième sens du requin relève du millionième de volt. Il détecte 0,5 microvolt par mètre (0,5 μV/m). Une pile de 1,5 volt constitue pour lui une source électrique qu’il peut ressentir à plus de 1 000 kilomètres.
Outre l’utilité des ampoules de Lorenzini pour la détection des proies, ces organes sensoriels ont une portée que nous avons du mal à nous figurer. Nous en sommes encore aux balbutiements de la recherche sur les champs électriques produits par la planète et les courants océaniques, mais on comprend que les requins sont suffisamment sensibles pour les percevoir, et surtout pour les interpréter.
Les squales se fient à ces champs pour s’orienter et se déplacer. Le propre champ électrique induit par leur corps produit une signature magnétique unique en interférant avec les champs électriques des océans.
Le requin n’a pas besoin de boussole pour se repérer et ses trajets portant sur des milliers de kilomètres ne doivent rien au hasard.
Le fonctionnement de l’ampoule de Lorenzini
Les ampoules de Lorenzini sont utilisées pour localiser et capturer des proies, grâce à la détection des champs électriques qu’elles génèrent, car tous les êtres vivants en produisent. Les raies et les requins peuvent ainsi identifier les proies lointaines, ainsi que celles qui se croient à l’abri, camouflées dans les fonds sableux.
Le requin est sensible aux signaux que lui envoient ses ampoules de Lorenzini lorsqu’elles détectent une différence entre la tension établie à la base du bulbe électro-récepteur et celle qui règne au niveau du pore de la peau. Lorsque celui-ci reçoit un stimulus positif, le taux d’activité du nerf de l’ampoule de Lorenzini faiblit ; au contraire, lorsque le pore perçoit un stimulus négatif, le taux d’activité du nerf augmente. Ces variations sont traduites simultanément par le cerveau du requin qui « visualise » les émetteurs de ces champs, ainsi que leurs déplacements, grâce à une interprétation en trois dimensions.
Les battements du cœur et la respiration de chaque être vivant créent un champ électrique. Grâce à la précision de ses ampoules de Lorenzini, le requin perçoit chaque contraction musculaire, ce qui lui permet de suivre sans les voir les déplacements des animaux qui l’entourent. S’il chasse dans des eaux troubles, à de grandes profondeurs où la visibilité est nulle ou durant la nuit, il peut se fier à ce sixième sens infaillible.
Le système de ligne latérale
Le requin possède un autre système de pointe, indépendant des ampoules de Lorenzini. Il s’agit du canal de la ligne latérale. Il est relié à des pores plus imposants. Son rôle est de détecter les courants marins et les variations de pressions. Ainsi, le requin identifie les mouvements précis des animaux qui se trouvent dans un rayon de 20 mètres.
La vidéo ci-dessous explique la différence entre les ampoules de Lorenzini et le canal de la ligne latérale.
Présentation des ampoules de Lorenzini et du canal de la ligne latérale
Merveilleuse création de la nature, La peau du requin blanc : une structure de haute technologie ajoute aux performances du squale dans son élément naturel.
Incroyable ! Détecter l’équivalent d’une petite pile à 1000 km !!!!
Et capables de se diriger au travers des océans grâce aux champs magnétiques…