Requin tigre, tout savoir sur Galeocerdo cuvier

Le requin tigre (Galeocerdo cuvier) est une espèce de requin de fond et le seul membre existant du genre Galeocerdo. On le trouve dans de nombreuses eaux tropicales et tempérées, en particulier autour des îles du Pacifique central. Le requin tigre doit son nom aux rayures sombres qui parcourent son corps et qui ressemblent à celles d’un tigre. Elles s’estompent toutefois au fur et à mesure que le squale vieillit.

Carte d’identité du requin tigre/Galeocerdo cuvier

Description physique du requin tigre

Taille et poids du requin tigre

Le requin-tigre (Galeocerdo cuvier) est l’un des plus grands requins du monde. Les adultes atteignent une longueur comprise entre 3,3 à 4,7 mètres et pèsent entre 300 et 900 kilos. Sa longueur à la naissance varie de 0,5 à 1 mètre. Les mâles atteignent la maturité sexuelle entre 2,3 et 2,9 mètres, tandis que les femelles atteignent la maturité entre 2,5 et 3,5 mètres.

Les plus grands spécimens de requin tigre dépassent les 5 mètres de long. Il s’agit de femelles, car elles sont en règle générale plus imposantes que les mâles (on parle de dimorphisme sexuel). Il est fait état d’une femelle requin tigre qui détiendrait le record avec une longueur de 7,4 mètres pour un poids de 3 110 kilos. Toutefois, les données relatives à ce squale pêché en 1957 en Chine n’ont jamais été homologuées.

La robe caractéristique du requin tigre

La peau du requin tigre varie généralement du gris bleu au vert clair, avec un ventre blanc, crème ou jaune pâle. Cette robe lui confère un camouflage idéal lorsqu’il chasse ses proies :

• lorsque le requin tigre se trouve en dessous de sa proie, celle-ci ne distingue pas son dos de la couleur sombre des profondeurs ;
• lorsque le squale est au-dessus de sa potentielle victime, son ventre clair se fond avec la lumière qui éclaire la surface de l’eau.

Outre sa taille imposante, le requin tigre est reconnaissable entre tous grâce à sa robe qui rappelle le félin dont il emprunte le nom avec des rayures verticales sur ses flancs. Ces marques s’estompent néanmoins ou disparaissent chez les squales les plus âgés.

Les dents uniques du requin tigre

Le requin tigre est également reconnaissable à ses dents en forme de faucille, similaires sur la mâchoire supérieure et sur la mâchoire inférieure. Leurs contours dentelés lui permettent de déchirer la chair et de briser les os et les carapaces de ses proies.

Comme chez la plupart des requins, ses dents sont continuellement remplacées par des rangées de nouvelles dents tout au long de sa vie. Par rapport à la taille du requin, les dents du requin tigre sont considérablement plus courtes que celles du grand requin blanc, mais elles sont presque aussi larges et mieux adaptées pour trancher des proies à la surface dure, notamment les carapaces de tortues.

La forme unique de ses dents s’adapte à tous les types de proies. Cela lui permet de se nourrir d’une grande variété d’aliments et qui contribue à éviter les pénuries de nourriture qui pourraient survenir chez des animaux plus sélectifs.

Les autres caractéristiques physiques du requin tigre

Le requin tigre appartient à la famille des Carcharhinidés, en anglais « requiem shark ». Sa tête est imposante et angulaire, son museau est court et émoussé ; il possède des sillons labiaux prononcés. Des spiracles sont également présents. Il s’agit d’orifices d’évacuation de l’eau, en forme de poche, situés entre l’œil et la première fente branchiale.

La queue du requin tigre est hétérocerque, c’est-à-dire que le lobe dorsal de la nageoire caudale est plus long que le lobe ventral.

Le requin tigre possède un corps élancé, avec de longues nageoires, tandis que sa longue queue lui permet de prendre de la vitesse.

Les sens aiguisés du requin tigre

Le museau du requin tigre est parsemé de petites cavités qui contiennent des électro-récepteurs appelés ampoules de Lorenzini. Elles lui permettent de détecter les champs électriques, y compris les faibles impulsions électriques générées par les proies, ce qui constitue un atout lorsqu’il chasse.

Le requin tigre possède également un organe sensoriel appelé ligne latérale qui s’étend sur ses flancs sur la majeure partie de la longueur de ses côtés. Le rôle principal de cette structure est de détecter d’infimes vibrations dans l’eau. Ces adaptations permettent au requin-tigre de chasser dans l’obscurité et de détecter des proies cachées.

La vision

Le requin tigre ne possède pas de paupières supérieures ou inférieures mobiles, mais une membrane nictitante, c’est-à-dire une paupière qui peut recouvrir l’œil.

Une couche réfléchissante derrière sa rétine, appelée tapetum lucidum, permet aux cellules de détection de la lumière d’avoir une seconde chance de capturer les photons de la lumière visible, ce qui améliore sa vision dans des conditions de faible luminosité.

Aire de répartition mondiale et habitat du requin tigre

Le requin tigre est présent dans le monde entier dans les mers tempérées, tropicales et subtropicales.

• Atlantique Ouest : du Massachusetts à l’Uruguay, golfe du Mexique, Bahamas, Caraïbes.
• Atlantique Est : Islande et Royaume-Uni (en raison de la chaleur du Gulf Stream), Maroc, îles Canaries, ainsi que du Sénégal à la Côte d’Ivoire.
• Méditerranée parfois.
• Océan Indien : de l’Afrique du Sud à la mer Rouge, Pakistan, Inde, Sri Lanka, Maldives, Thaïlande, Viêt Nam.
• Pacifique occidental : Chine méridionale, Japon, Philippines, Indonésie, Australie, Nouvelle-Zélande, Nouvelle-Calédonie.
• Pacifique central occidental : Palau, Îles Salomon, îles Marshall, Tahiti et Hawaï.
• Pacifique oriental : Californie du Sud, Pérou, Galapagos.

Le requin tigre vit dans les eaux côtières et pélagiques, de la surface jusqu’à des profondeurs d’environ 350 mètres. Il présente une large tolérance pour différents habitats marins, mais semble préférer les eaux turbides sur ou à proximité des plateaux continentaux et insulaires.

On le trouve aussi souvent dans les estuaires des rivières, près des côtes, dans les atolls coralliens et les lagons. S’il a tendance à rester dans les eaux profondes qui bordent les récifs, il lui arrive en effet de se déplacer dans les chenaux pour poursuivre ses proies dans les eaux moins profondes.

Le comportement du requin tigre est essentiellement nomade, mais il est guidé par les courants plus chauds et il reste plus près de l’équateur pendant les mois les plus froids. Ce chasseur solitaire est davantage nocturne ; il se déplace vers les eaux peu profondes la nuit pour se nourrir, puis retourne vers les eaux plus profondes dans la journée.

L’arsenal dévastateur du requin tigre

Les proies du requin tigre

Le requin tigre est un chasseur solitaire, essentiellement nocturne. Le juvénile se nourrit principalement de petits poissons, ainsi que de diverses petites méduses et de mollusques, y compris des céphalopodes. Lorsqu’il atteint plus de 2 mètres de long, sa sélection s’élargit considérablement et des animaux beaucoup plus grands deviennent des proies régulières.

Il présente alors la particularité d’adopter le plus large spectre alimentaire de tous les requins, avec une gamme de proies qui comprend des crustacés, oiseaux, calmars, serpents de mer, poissons, y compris d’autres requins, tels des requins gris adultes (Carcharhinus plumbeus), des raies et parfois même d’autres requins tigres.

Les tortues marines font aussi partie de son menu, y compris les trois plus grandes espèces : la tortue luth (Dermochelys coriacea), la tortue caouanne (Caretta caretta) et la tortue verte (Chelonia mydas). Des tortues de mer adultes ont été trouvées dans plus de 20 % des estomacs de requins tigres étudiés, ce qui indique une préférence alimentaire avérée pour ces reptiles à carapace.

Le requin tigre s’attaque aussi aux mammifères marins : dauphins – grand dauphin (Tursiops), dauphin commun (Delphinus) ou dauphin tacheté (Stenella frontalis) –, dugongs, phoques et otaries. En raison du risque élevé de prédation, les dauphins évitent souvent les régions habitées par le requin tigre. Les baleines blessées ou vieillissantes peuvent également être attaquées et mangées. Un groupe de requins tigres a notamment été observé en train de tuer une baleine à bosse (Megaptera novaeangliae) en 2006 près d’Hawaï.

Le squale chasse ses proies, mais en bon opportuniste, il adopte un comportement de charognard lorsque l’occasion se présente. Un requin tigre a par exemple été vu en train de se repaître d’une carcasse de baleine, aux côtés de grands requins blancs.

Les mammifères terrestres ne sont pas épargnés !

Des restes de mammifères terrestres sont fréquemment retrouvés dans le contenu de l’estomac des requins tigres autour des côtes d’Hawaï. Il s’agit notamment des :

• chevaux (Equus ferus caballus) ;
• chèvres (Capra aegagrus hircus) ;
• moutons (Ovis aries) ;
• chiens (Canis lupus familiaris) ;
• chats (Felis catus) ;
• rats bruns (Rattus norvegicus).

 Des cas de restes de renards volants ont été répertoriés dans l’estomac de requins tigres. Les « renards volants » ou roussettes sont des chauves-souris du genre Pteropus qui regroupe plusieurs espèces parmi les plus grandes au monde.

Un style d’alimentation parfois aveugle

Le requin tigre a également la réputation d’être un éboueur des océans, car une grande variété d’objets non comestibles est régulièrement retrouvée dans son estomac. En raison de son style d’alimentation aveugle, il mange en effet souvent par erreur des déchets qui n’ont rien à faire dans l’océan (plaques d’immatriculation de voiture, bidons d’huile, pneus, balles de baseball, etc.).

L’approche lente pour un taux élevé de prédation

Le squale nage généralement lentement et profite de sa coloration pour se rendre indétectable et approcher facilement de ses proies. Au dernier moment, il est capable de se propulser rapidement pour fondre sur sa victime, ne lui laissant aucune chance de s’échapper.

La reproduction du requin tigre

Les femelles s’accouplent une fois tous les trois ans. Elles se reproduisent par fécondation interne. Le mâle insère l’un de ses crochets dans l’ouverture génitale de la femelle (cloaque), servant de guide aux spermatozoïdes. Le mâle utilise ses dents pour maintenir la femelle immobile pendant la procédure, ce qui provoque souvent des blessures considérables chez la femelle.

Les petits se développent à l’intérieur du corps de la mère jusqu’à plus de 12 mois. Dans l’hémisphère nord, l’accouplement a généralement lieu entre mars et mai ; dans l’hémisphère sud, l’accouplement a lieu en novembre, décembre ou début janvier.

Le requin tigre est ovovivipare, ce qui signifie que la mère met au monde un requin parfaitement autonome. Les œufs sont conservés dans le corps de la femelle dans une chambre de ponte où l’embryon se développe, nourri par un sac vitellin. Les petits éclosent des capsules d’œufs à l’intérieur de l’utérus de la mère et naissent peu de temps après.

Les portées comptent entre 10 et plus de 60 bébés requins. À la naissance, les petits sont très minces et présentent des rayures verticales clairement définies qui s’estompent au fur et à mesure qu’ils deviennent adultes. Leur croissance est assez lente, ce qui les rend vulnérables.

La croissance du requin tigre

Des études montrent qu’au fur et à mesure de sa croissance, la queue du requin tigre devient plus symétrique. En outre, alors que la tête des juvéniles est plus conique, les requins tigres adultes ont une tête relativement plus large. On pense que la nageoire caudale plus large chez les juvéniles est une adaptation qui lui permet d’échapper aux prédateurs plus grands et d’attraper des proies qui se déplacent plus rapidement.

Les résultats de cette étude ont été interprétés comme reflétant deux transitions écologiques : à mesure que les requins tigres atteignent la maturité, ils deviennent plus migrateurs et une queue symétrique est plus avantageuse pour les déplacements sur de longues distances. Par ailleurs, les requins tigres consomment des proies plus diversifiées avec l’âge, ce qui nécessite une plus grande force de morsure, grâce à une tête plus large.

La longévité des requins tigres n’est pas connue, mais elle est estimée à plus de 12 ans.

Conservation

Le requin tigre est inscrit sur la liste rouge de l’UICN en tant qu’espèce quasi menacée (NT). Il est malheureusement souvent capturé dans les pêcheries ciblées et non ciblées. Il est entre autres chassé pour ses ailerons, son foie et sa chair.

Le requin tigre est aussi la proie des orques. Celles-ci ont été observées en train de chasser et de tuer des requins tigres en les tenant la tête en bas pour induire une immobilité tonique afin de les noyer. Les orques mordent les ailerons du requin avant de l’éventrer pour se saisir de son foie, d’une exceptionnelle richesse nutritive.

Créée en 2013, l’association Shark Mission France sensibilise le public sur la condition des requins dans le monde. Elle milite notamment contre la pêche qui massacre les requins pour commercialiser leurs ailerons. Je vous invite à vous rendre sur le site Internet de Shark Mission France pour vous informer et éventuellement vous impliquer aux côtés des bénévoles de l’association.