L’écholocalisation de l’orque est essentielle pour traquer les proies et lui permettre d’être au sommet de la chaîne alimentaire. Découvrez le décryptage de ce sens extrêmement sophistiqué.
Le spectaculaire saut de l’orque (ou brèche)
Le saut de l’orque hors de l’eau est particulièrement spectaculaire. On parle de « brèche », car l’épaulard effectue une percée dans l’eau pour apparaître à l’air libre, partiellement ou tout entier. En anglais, cela se traduit par « breaching ». Dave Ellifrit, membre historique du personnel du Center for Whale Research et responsable de l’étude des orques, décrypte ce comportement. Ce spécialiste suit en effet depuis de très nombreuses années les orques résidentes du Sud, ainsi que les orques transientes de Colombie-Britannique.
Sommaire
Les observations du saut de l’orque par Dave Ellifrit
Dave Ellifrit est membre du Center for Whale Research depuis 1990. Il est responsable de la conservation de la photothèque des orques et de la base de données associée. Il est le « gars aux nageoires » (fin-guy), capable de reconnaître pratiquement n’importe quelle orque du Pacifique Nord-Est d’un seul coup d’œil.
Les différentes brèches
Dave Ellifrit définit différents types du saut de l’orque. Il décrit une brèche comme « un effort pour soulever au moins un tiers de son corps hors de l’eau, puis atterrir sur le flanc, le ventre ou le dos, en produisant une éclaboussure plus ou moins impressionnante ».
L’observateur liste différents types de brèches.
La brèche complète (full breach) ou brèche normale (normal breach)
Lors du saut de l’orque, l’animal sort presque entièrement de l’eau, exposant ses flancs, et atterrit sur le côté.
La demi-brèche (half breach)
L’orque soulève un tiers à la moitié de son corps hors de l’eau et atterrit sur le flanc.
La chute ventrale (belly flop)
L’épaulard effectue une brèche, mais atterrit sur le ventre ou entre dans l’eau la tête la première.
Le plongeon sur le dos (back dive)
À la fin du saut de l’orque, le cétacé atterrit sur le dos.
Le saut de l’orque à Monterey – Californie – USA
Quelles sont les raisons du saut de l’orque ?
Les motivations du saut de l’orque demeurent mystérieuses, mais Dave Ellifrit tire quelques conclusions de ses très nombreuses observations.
Juste pour l’amusement ?
Il est fréquent que plusieurs orques effectuent des brèches au moment où elles franchissent un cap. C’est le cas par exemple lorsqu’elles se dirigent vers le nord, au-delà d’East Point de l’île Saturna en Colombie-Britannique et dans le détroit de Géorgie. S’agit-il simplement d’excitation ? Les jeunes orques en train de socialiser semblent effectuer plus de brèches que les autres membres du pod ; il est envisageable qu’elles le fassent, car il s’agit d’un comportement « amusant » pour elles. Mais ces juvéniles ne sont pas les seules à nous régaler de ce spectacle, d’autres orques plus isolées au sein d’un groupe peuvent aussi surgir hors de l’eau au même moment, avant de reprendre normalement leur chemin.
Dans tous les cas, les brèches peuvent être interprétées comme une manifestation de joie.
Pour communiquer grâce au son produit lorsque l’orque retombe dans l’eau ?
Il est peu probable que le son produit par le saut de l’orque soit utilisé pour communiquer sur de longues distances, car il est loin d’être aussi fort que les cris, les sifflements et les clics des orques. Mais peut-être qu’une brèche à proximité d’un autre épaulard constitue une sorte de signal.
Pour se réjouir d’une chasse victorieuse ?
Chez les orques de Bigg (nomades se nourrissant principalement de mammifères marins), les sauts semblent se produire le plus souvent pendant une chasse ou après une mise à mort. Les individus effectuant les brèches sont le plus souvent ceux qui n’y participent pas. Il se peut que les orques spectatrices se laissent tout simplement emporter par l’excitation.
Dave Ellifrit explique avoir observé l’orque T137A effectuer quatre brèches à la suite pendant une chasse à laquelle elle n’avait pas participé. Il émet l’hypothèse que les éclaboussures supplémentaires créent de la confusion chez les proies et les empêchent de s’élancer dans certaines directions pour s’échapper.
Le saut de l’orque à la suite d’une victoire est interprété comme un comportement de célébration. Rappelons que chez ces cétacés, les proies sont partagées par tous les membres du pod, quel qu’ait été leur rôle – actif ou passif – durant la chasse.
Quelle est l’influence de la maternité dans la multiplication du saut de l’orque résidente ?
Dave Ellifrit a remarqué que les jeunes femelles résidentes du Sud multiplient les brèches dans les années précédant la naissance de leur premier baleineau. Il a observé que J32 était la « brécheuse » la plus assidue ! L53 également était connue pour ses comportements en surface assez fous, ce qui a permis aux membres du Centre for Whale Reseach de prendre de très nombreuses photos d’elle. J19 était aussi réputée pour effectuer des brèches à répétition, alors qu’elles sont moins nombreuses aujourd’hui.
Consultez l’article Orque Canada et USA : à la rencontre des résidentes du Sud pour découvrir cette population du Pacifique Nord.
Le saut de l’orque est plutôt un comportement masculin chez les épaulards transients
Chez les orques transientes, Dave Ellifrit estime que les brèches sont plus nombreuses chez les mâles. C’est notamment le cas pour T19B, T101B et T123A. Il n’a pour l’instant aucune explication satisfaisante pour les différencier de leurs congénères.
Le chemin sera encore long pour expliquer les raisons du saut de l’orque… si tant est qu’il y en ait un ! Quoi qu’il en soit, le régal est absolu pour les observateurs qui ont la chance d’assister à ce merveilleux spectacle.
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