Selon une étude de son génome publiée en août 2024, la population du requin blanc s’est divisée il y a environ 150 000 ans, pour ne jamais plus se croiser.
Que sait-on du menu du mégalodon ?
Les requins mégalodons régnaient sur les océans il y a des millions d’années et cela fait des décennies que les chercheurs émettent des hypothèses quant à leur alimentation. De nouvelles analyses de dents géantes fossilisées leur permettent aujourd’hui d’ajouter une pierre à cet édifice. Au menu : cachalots et dauphins principalement.
Sommaire
Les dents du mégalodon, principales bases de travail pour les scientifiques
Il y a des millions d’années, des requins géants — trois fois plus grands que les grands blancs d’aujourd’hui — écumaient les océans du monde entier. Il y a bien longtemps qu’ils ont disparu, et pourtant, des dents fossilisées de ces prédateurs géants réapparaissent régulièrement sur les plages.
Ces dents géantes — de la taille d’une main humaine — présentent des dentelures sur les bords, comme celles du grand requin blanc actuel. Elles constituent la base principale de travail des scientifiques. En effet, les requins présentent l’inconvénient pour les chercheurs de posséder un squelette de cartilage qui résiste mal au temps et ne se fossilise pas comme les squelettes osseux des cétacés.
Pour comprendre comme il vivait et de quoi il se nourrissait, les chercheurs focalisent donc leurs recherches sur les dents du mégalodon, en les comparant avec les stigmates de morsures trouvées sur les squelettes des cétacés de son époque.
Quel était le menu mégalodon ?
Sa taille étant estimée à une quinzaine de mètres de long, le mégalodon serait la plus grande espèce de requin ayant jamais existé. Des traces de dents et de morsures trouvées sur des os fossilisés suggèrent que ces anciens requins nageaient dans l’océan il y a entre 23 millions et 3,5 millions d’années. Cette théorie est développée dans l’étude The Early Pliocene extinction of the mega-toothed shark Otodus megalodon : a view from the eastern North Pacific (L’extinction au Pliocène précoce du méga-requin à dents Otodus megalodon : une vue de l’est du Pacifique Nord), publiée en février 2019.
Pour comprendre comment il vivait, les scientifiques étudient les dents du mégalodon. Ils en ont déduit que les dentelures qui bordent chaque dent en constituant autant de petites dents, apparaissent particulièrement bien adaptées pour attaquer les mammifères marins, tandis que les dents pointues et acérées, mais au bord lisse, des autres requins semblent plus adaptées pour percer et déchirer le corps des poissons.
Une étude proposant la reconstitution en 3D du mégalodon, le plus grand requin du monde, permet d’en connaître davantage sur le menu du mégalodon.
Des traces de morsures du mégalodon sur les ossements fossiles de mammifères marins
Des ossements fossiles de mammifères marins ont été retrouvés avec les marques de morsures du mégalodon. Certains os des cachalots contemporains du squale portent des traces d’attaques de mégalodons sur le front du cétacé, c’est-à-dire son melon, riche en graisse, spermaceti et nutriments.
Des os de queues de dauphins ont également été trouvés avec des marques de dents profondes de mégalodon. Chacun de ces incroyables fossiles nous offre un cliché instantané du repas d’un mégalodon !
Ces données sont notamment tirées de l’étude Did the giant extinct shark Carcharocles megalodon target small prey? Bite marks on marine mammal remains from the late Miocene of Peru (Le requin géant disparu Carcharocles megalodon ciblait-il les petites proies ? Marques de morsures sur des restes de mammifères marins de la fin du Miocène du Pérou), publiée en mars 2017.
Pourquoi le mégalodon appréciait-il tant le cachalot ?
D’après une nouvelle analyse des crânes fossilisés de mammifères marins, le mégalodon aurait souvent pris pour cible le melon du cachalot. Une équipe internationale de chercheurs a décrit les signes de cette recherche de nourriture focalisée, relevés dans des os de cachalots vieux de 7 millions d’années dans l’étude Sperm whales (Physeteroidea) from the Pisco Formation, Peru, and their trophic role as fat sources for late Miocene sharks (Cachalots [Physeteroidea] de la Formation de Pisco, Pérou, et leur rôle trophique comme sources de graisse pour les requins du Miocène tardif).
Les cachalots, qu’ils soient modernes ou préhistoriques, possèdent une tête géante, représentant environ un tiers de la longueur de leur corps. Ces têtes massives abritent leurs organes de production sonore, incroyablement complexes. Ceux-ci leur permettent de produire des sons plus forts que n’importe quel autre animal sur la planète. La majeure partie de leur crâne est remplie d’une substance extrêmement grasse appelée spermaceti.
En étudiant divers spécimens de cachalots conservés au Musée d’histoire naturelle de Lima, les paléontologues ont découvert des marques de morsures qui correspondaient aux régions nasales les plus grasses.
« De nombreux requins utilisaient ces cachalots comme réservoir de graisse », a déclaré l’auteur principal de l’étude, Aldo Benites-Palomino, candidat au doctorat au musée paléontologique de l’université de Zurich en Suisse. « Pour un seul spécimen, nous avons repéré des traces de morsures dans la région frontale, émanant d’au moins cinq ou six espèces de requins, ce qui paraît insensé. »
Aldo Benites-Palomino et ses collègues estiment que l’énorme tête du cachalot constituait une source de nourriture bien plus attrayante que celle des mammifères marins plus petits, plus faciles à attraper, mais moins nourrissants.
Une prédation ou un comportement de charognard de la part du mégalodon ?
Il apparaît probable que la tête des cachalots ait été dévorée après la mort des cétacés.
« Nos résultats indiquent que tous ces événements avaient lieu post-mortem », a déclaré Benites-Palomino. « Les carcasses auraient flotté pendant des jours, jusqu’à ce que toute la graisse soit ingérée par les requins, avant de couler. »
L’équipe de recherche a trouvé un assortiment de marques de morsures qui correspondent à plusieurs espèces de requins affamés, mais ce sont naturellement les morsures du mégalodon qui impressionnent le plus.
Le mégalodon montrait aussi un penchant certain pour les dauphins
Le paléontologue en chef du Calvert Marine Museum, Stephen Godfrey, a travaillé sur le fossile d’un animal mordu par un mégalodon et découvert à Calvert Cliffs, dans l’État du Maryland aux États-Unis. Les conclusions de ses travaux furent publiées en 2018 sous le titre Carcharocles-bitten odontocete caudal vertebrae from the Coastal Eastern United States (Vertèbres caudales d’odontocètes mordues par Carcharocles provenant du littoral Est des États-Unis).
Les fossiles des os de la queue des dauphins montrent des marques de morsures du requin. Elles suggèrent que le mégalodon pourchassait les dauphins préhistoriques et les handicapait en mordant profondément dans leur queue qui leur sert de gouvernail et de propulsion.
Ces découvertes prouvent que le mégalodon s’attaquait également à des animaux relativement petits, par rapport à sa propre taille énorme, en plus des baleines et des cachalots.
La chimie pour analyser le menu du mégalodon
Les mammifères marins appartenaient-ils au régime alimentaire habituel du mégalodon ou représentaient-ils simplement un en-cas spécial ? Et quelles étaient ses autres proies ?
Grâce à des outils récemment mis au point, les scientifiques ont analysé la composition chimique des dents fossiles du mégalodon provenant des États-Unis, d’Europe occidentale et du Japon.
Lorsque les animaux mangent, ils ingèrent des nutriments contenus dans leurs aliments, notamment de l’azote et du zinc. Ces deux éléments sont ainsi transmis dans la chaîne alimentaire de la proie au prédateur, tout en étant légèrement modifiés (sous forme d’isotopes), ce qui permet d’en connaître davantage sur les prédateurs et leur place dans la chaîne alimentaire.
Par ailleurs, de très petites quantités d’azote et de zinc sont préservées dans les couches minérales des dents fossiles. Les scientifiques extraient et purifient ces éléments, les analysent, puis estiment la position dans la chaîne alimentaire pour chaque requin préhistorique.
Les isotopes de l’azote et du zinc présents dans les dents fossiles nous renseignent sur le régime alimentaire d’animaux vivant dans des écosystèmes qui ont disparu il y a des millions d’années. Les isotopes d’azote et de zinc ont ainsi servi à reconstituer le régime alimentaire des requins, mais aussi celui du grand requin blanc.
L’extinction du mégalodon : une compétition avec le requin blanc ?
Comprendre le régime alimentaire du mégalodon peut nous aider à élucider le mystère de son extinction, ainsi que les conséquences de sa disparition sur l’écologie marine.
Les mesures montrent que le mégalodon — et ses ancêtres aux grandes dents légèrement plus petits — se plaçait au plus haut niveau de la chaîne alimentaire. Il est fort probable que le mégalodon n’ait connu aucun prédateur. Pour occuper une position aussi privilégiée, il se nourrissait entre autres de mammifères marins aujourd’hui disparus, comme les cachalots préhistoriques. Le mégalodon pouvait également être cannibale, les adultes les plus grands mangeant les jeunes.
Découvrez comment le bébé mégalodon survivait grâce au cannibalisme !
L’émergence du requin blanc moderne, il y a environ 5 millions d’années, est considérée comme un facteur qui aurait pu contribuer à l’extinction du mégalodon. On pense que les requins blancs se nourrissaient de proies similaires. Des similitudes dans la forme des dents et des traces de morsures fossiles sur des espèces similaires suggèrent également que les requins blancs ont pu entrer en concurrence avec le mégalodon. Cependant, cette hypothèse demeure encore controversée.
La disparition du mégalodon pourrait également avoir été causée par une combinaison d’autres facteurs, tels que des changements de température et la disparition des environnements de plateau continental en raison de la baisse du niveau de la mer.
Les recherches continuent et nous en apprenons toujours davantage sur ce géant préhistorique, le plus grand requin du monde de tous les temps !
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