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Orque offshore

Que sait-on de l’orque offshore ou épaulard hauturier ?

L’orque offshore ou épaulard hauturier appartient à une population peu connue de cétacés. Évoluant en haute mer, elle est en effet beaucoup moins souvent rencontrée par les scientifiques. L’une de ses particularités notoires est de posséder une dentition souvent en mauvais état, ce qui s’explique par son mets favori : le requin.

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Les caractéristiques de l’orque offshore

Les épaulards hauturiers sont légèrement plus petits que les épaulards transients et les résidents (avec lesquels ils sont génétiquement étroitement liés). Ils se distinguent par leurs nageoires dorsales très arrondies. Leurs patchs de selle sont foncés et souvent fermés, mais peuvent montrer des intrusions noires.

À ce jour, les orques offshore n’ont été observées que dans l’est du Pacifique Nord, de l’Alaska à la Californie du Sud, avec une population estimée à 300 individus. Leur présence n’a jamais été documentée ailleurs.

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Les analyses de divers pods permettent d’établir les caractéristiques des différentes lignées d’orques offshore.

  • Les groupes sont généralement constitués de 30 à 60 individus, voire plus.
  • Ils sont rarement observés dans les eaux côtières protégées.
  • La plupart des rencontres a eu lieu près des îles de la Reine-Charlotte et à 30 ou 50 kilomètres au large de la côte ouest de l’île de Vancouver.
  • Des individus ont été photographiés tout au long de la côte pacifique, du sud de la Californie au sud-est de l’Alaska.
  • Les orques offshore sont piscivores, c’est-à-dire qu’elles se nourrissent de poissons, dont les requins, en particulier de requins dormeurs.
  • Elles présentent de fortes similitudes génétiques et morphologiques avec les orques résidentes qui vivent de façon sédentaire proches des côtes.
  • Les orques offshore partagent entre elles un ensemble de cris complètement différents de ceux de toute autre communauté, qu’elle soit résidente ou transiente.
  • Elles possèdent une génétique différente des épaulards transients ou résidents.
  • Elles ne se mélangent pas aux autres écotypes, ne les fréquentent pas et ne s’accouplent pas avec.
  • Elles ont acquis des stratégies de chasse différentes.
  • Les orques hauturières vocalisent énormément, à l’instar de leurs cousines résidentes.
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© Emma Luck

« C’est passionnant, c’est une chasse au détective qui dure depuis si longtemps », a déclaré John Ford, chercheur à la station biologique fédérale du Pacifique à Nanaimo. « Cela fait des années par exemple que nous nous demandons de quoi se nourrissent les orques qui vivent au large des côtes. »

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© Emma Luck

Rares images sous-marines d’orques offshore prises à partir d’une nacelle d’observation sous-marine

Des déplacements sur de très grandes distances

Les orques hauturières se déplacent en pods et sont parfois silencieuses, ce qui leur permet de se faufiler parmi leurs proies. 250 à 300 individus ont été identifiés dans le nord-est de l’océan Pacifique ; ils se déplacent dans les eaux du plateau continental, allant de la Californie à l’Alaska et probablement jusqu’à des centaines, voire des milliers de kilomètres au large des côtes. Il a été démontré que les orques offshore parcourent de grandes distances, allant jusqu’à 4 435 kilomètres, une valeur bien supérieure à celle rapportée pour d’autres écotypes.

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Les premières rencontres avec l’orque offshore du Pacifique

Depuis les années 1970, les scientifiques appliquent des distinctions entre les populations d’orques résidentes et transientes. En Colombie-Britannique notamment, les deux groupes sont isolés sur le plan de la reproduction, génétiquement distincts et constituent des lignées uniques sur le plan acoustique. Ce n’est qu’à la fin des années 1980 qu’une troisième population, surnommée « orque offshore » en raison de sa tendance à fréquenter les eaux du plateau continental extérieur, a été découverte. Bien qu’il ait été déterminé qu’il s’agissait d’une lignée distincte des résidentes et des transientes, l’éloignement géographique de ces cétacés les rend difficiles à étudier et on sait peu de choses sur leur régime alimentaire et leur structure sociale.

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Le 6 septembre 1992, Orca Survey a reçu un appel de Seacoast Expeditions signalant un groupe d’environ 70 orques au large de Victoria qu’ils ne pouvaient pas identifier à partir des manuels d’identification. Ken Balcomb, Astrid van Ginneken, Diane Claridge et Dave Ellifrit se sont immédiatement rendus sur place pour prendre des photos d’identification. Ils ont photographié 67 orques offshore.

Ce n’était que la deuxième fois qu’ils rencontraient ce type d’épaulard. La première fois, c’était le 20 août 1990, et ces orques se trouvaient à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Barkley Sound, sur la côte ouest de l’île de Vancouver. 48 orques offshore ont été photographiées lors de cette rencontre.

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L’orque offshore à l’origine des populations résidentes

Les données sur l’ADN suggèrent que les orques résidentes sont issues des matrilignages des populations hauturières dans chacune de leurs aires de répartition, peut-être d’une manière analogue aux groupes de parents humains qui ont rayonné dans les habitats côtiers lorsque la glace s’est retirée du nord-ouest du Pacifique.

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L’adaptation pour la survie

L’adaptation écologique à l’origine de la séparation entre les trois types d’orques est nécessaire pour réduire la concurrence entre les différentes lignées. Lorsqu’un groupe se spécialise dans la chasse de certaines proies distinctes, le taux de survie est plus élevé pour les trois types. Les orques du nord-ouest du Pacifique se sont adaptées pour occuper différentes niches écologiques en s’appuyant sur différentes sources de nourriture : les résidentes mangent du poisson (principalement du saumon royal), les orques transientes se nourrissent de mammifères marins et l’épaulard hauturier de requins.

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Le requin au menu de l’orque offshore

L’étude Movements and Diving Behavior of the Eastern North Pacific Offshore Killer Whale (Orcinus orca) (Mouvements et comportement de plongée de l’orque du large du Pacifique Nord-Est [Orcinus orca]) nous permet d’en apprendre davantage sur l’alimentation de l’orque offshore.

« Nous avons commencé à spéculer sur le fait qu’elles se nourrissaient peut-être de requins dont la peau est très rugueuse. Lorsqu’elle sèche, elle ressemble à du papier de verre », explique l’un des scientifiques associés à l’étude. À la suite de l’observation d’orques hauturières, l’équipe les a vues se nourrir ; immédiatement après, des morceaux de viande rose sont apparus à la surface de l’eau. Après analyse génétique, ils se sont avérés être la viande d’au moins 16 requins dormeurs du Pacifique (Somniosus pacificus) différents. Leur peau particulièrement abrasive serait donc à l’origine de l’usure jusqu’à la gencive des dents de l’orque offshore.

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Des biopsies de graisse d’orques hauturières analysées pour mesurer les acides gras, les isotopes stables et les polluants organiques persistants ont confirmé qu’elles se nourrissaient d’un « poisson à longue durée de vie relativement haut dans la chaîne alimentaire », ce qui correspond au requin.

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La technique de chasse de l’orque offshore

Sur le terrain, les chercheurs ont observé qu’au cours d’une mise à mort, les orques offshore plongeaient jusqu’à une profondeur considérable où la prédation et la consommation avaient lieu. La plupart des individus étaient simultanément sous l’eau, alors qu’une nappe d’huile devenait visible à la surface et tandis que des morceaux de tissus remontaient des profondeurs. Ces tissus étaient mous et huileux et l’on suppose qu’il s’agissait de foie de requin.

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Les requins dormeurs sont communs sur le plateau continental du Pacifique Nord, tout comme les requins bleus, les requins-saumon et les aiguillats. Le requin dormeur est une espèce de grande taille qui atteint une longueur moyenne de 2 mètres et se trouve dans la colonne d’eau à des profondeurs similaires à celles auxquelles les orques peuvent plonger. Ils possèdent également un foie volumineux et riche en lipides qui les aide à contrôler leur flottabilité en profondeur. Ce foie peut représenter jusqu’à 80 % du poids d’un requin ! Il s’agit donc d’une source de nourriture substantielle et riche en énergie.

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L’usure des dents de l’épaulard hauturier

L’étude de l’état d’usure des dents par rapport aux orques résidentes et transientes montre que les dents d’une orque hauturière mature sont souvent usées jusqu’à la ligne gingivale. À l’opposé, l’usure des dents chez les autres orques apparaît négligeable, même chez les individus plus âgés, en raison de leur régime alimentaire composé de poissons à corps mou, de pinnipèdes et de cétacés. Les minuscules denticules dermiques (la version requin des écailles de poisson) de la peau du requin sont responsables de l’usure prématurée des dents.

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Dents extraites d’une orque échouée en Alaska en 2015 présentant des dommages importants, probablement causés par la consommation de requins © Journal of Comparative Pathology

L’entraide au sein du pod

Les orques transientes et résidentes sont connues pour partager les proies au sein du pod, même avec les individus n’ayant pas participé à la chasse. Ce comportement est assez rare pour être noté, car chez de nombreuses autres espèces, terrestres ou marines, il existe une hiérarchie et certains individus d’un groupe doivent parfois se contenter de miettes.

Les chercheurs supposent que les orques offshore dont la dentition est trop abîmée profitent du produit de la chasse des plus jeunes. Elles seraient sinon condamnées à très court terme.

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Des poissons plus petits en complément des requins

Des examens de contenus stomacaux des orques offshore ont révélé la présence d’autres espèces de poissons, indiquant qu’elles ne se nourrissent pas exclusivement de requins. Comme c’est la tendance en science, une réponse à une question en entraîne souvent plusieurs autres : dans le cas de l’orque offshore, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour déterminer le degré de spécialisation de leurs proies et l’importance des requins en tant que source de nourriture.

À suivre…

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