Au nom des requins de François Sarano

Au nom des requins de François Sarano a été publié en février 2022, chez Actes Sud. Comme à son habitude, l’océanographe et plongeur nous parle avec passion d’un monde qu’il connaît pour l’explorer depuis si longtemps. Il raconte d’ailleurs dans le livre certaines de ses expériences aux côtés du commandant Jacques-Yves Cousteau auprès duquel il commença sa carrière comme conseiller scientifique. Comme d’habitude, François Sarano ne se contente pas de parler de ce qu’il a vu, mais il nous livre ses réflexions sur la place de l’homme dans le monde des requins (et non le contraire, comme c’est trop souvent le cas). Comme d’habitude aussi, le livre est passionnant et se dévore de bout en bout, que vous soyez ou non plongeur.

Lady Mystery, la femelle requin blanc à l’origine du livre de François Sarano

Au nom des requins s’inscrit comme un plaidoyer pour réhabiliter une juste compréhension des requins. Les squales pâtissent en effet d’une épouvantable réputation qui fut en outre exacerbée avec le livre de Peter Benchley, écrit en 1974, puis adapté au cinéma en 1975, Jaws, en français Les Dents de la mer. L’auteur prit d’ailleurs conscience des malheureuses retombées de son ouvrage, comme il s’en explique dans son livre Shark Trouble. Affligé par ce constat, il consacra les dernières années de sa vie à défendre l’écosystème marin.

Mais revenons au livre de François Sarano. Il s’ouvre lui aussi sur les « images » d’un requin blanc, une immense femme nommée Lady Mystery, rencontrée pour la première fois en 2006, au large des côtes mexicaines. C’est elle que l’on voit dans le film Océans, signé Jacques Perrin et Jacques Cluzaud,

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« Cinq mètres de muscles, une tonne d’élégance, Lady Mystery est un grand requin blanc femelle, Carcharodon carcharias, sœur de ceux des Dents de la mer. » François Sarano

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Cette rencontre a particulièrement marqué François Sarano. Il put nager « épaule contre nageoire » pendant quelques instants, un immense cadeau de la part du squale géant qui lui accorda alors sa confiance. Le plongeur évoque cette rencontre inouïe — et celles qui suivirent — dans l’interview ci-dessous.

François Sarano nous parle de son livre Au nom des requins

Une ode aux requins

Les livres, tout comme les interviews, de François Sarano sont passionnants, car il est un professionnel qui connaît son sujet et en aucun cas un militant dogmatique et jusqu’au-boutiste. Il n’adopte pas un ton moralisateur, mais sait user de pédagogie pour rallier les autres à sa cause. Loin des écolos en carton, il nous apprend tant de choses sur les requins ! Même les lecteurs déjà avertis qui s’intéressent de près au monde de la mer et à sa faune seront emportés par son enthousiasme et en profiteront pour compléter leurs connaissances.

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« Ce livre fait le point sur les recherches scientifiques les plus récentes, sur leur biologie et sur leur système sensoriel exceptionnel. Il s’intéresse plus particulièrement aux découvertes en éthologie et en neurobiologie qui, si incroyable que cela puisse paraître, mettent en évidence la personnalité de chaque requin ! » Voilà ce que nous promet François Sarano dès les premières pages du livre. « Consacré à nos cousins de l’océan, ce livre est aussi une réflexion sur notre relation au monde et à l’altérité : le requin, comme symbole du “sauvage”, qui nous fait peur parce que nous le méconnaissons… »

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La promesse est tenue !

Histoire d’un malentendu, de Pline à Disney

Le premier chapitre du livre de François Sarano s’intitule Histoire d’un malentendu, de Pline à Disney. Il nous rappelle qu’en 343 avant Jésus Christ, Aristote décrivait déjà plusieurs espèces de requins (il y en a au moins 536 répertoriées aujourd’hui). 300 ans plus tard, les écrits de Pline l’Ancien, sont déjà à charge pour les squales.

Les siècles se suivent. François Sarano évoque les autres « monstres » mythiques, plutôt terrestres dans notre littérature si l’on excepte Jules Verne avec 20 000 lieues sous les mers.

L’auteur en profite pour évoquer la longévité des requins qui font partie des espèces les plus anciennes de notre planète.

Un plaidoyer pour la préservation des océans et pour les requins, tous les requins

Tout au long du livre, François Sarano nous livre ses connaissances sur les requins, mais aussi sur tous les dangers qui les menacent. C’est l’occasion de tordre le cou à la rumeur qui prétend que le requin dévore tout ce qui passe à portée de sa mâchoire. Le squale a en effet mis à profit les millions d’années pendant lesquelles il n’a cessé d’arpenter les océans pour optimiser de façon incroyable ses dépenses d’énergie. Il se contente de quantités de nourriture qui paraissent infimes en regard de l’énergie dont il a besoin pour nager et supporter des températures loin d’être clémentes. Ainsi, il passe le plus clair de son temps à vagabonder pacifiquement, au milieu de nombreuses proies potentielles, sans les chasser.

Le constat n’est pas toujours réjouissant pour les squales, très loin de là. Leur massacre a entre autres pour effet d’empêcher les adultes d’atteindre leur taille maximum. Le requin est un animal dont la maturité sexuelle est tardive, il lui faut donc du temps pour se reproduire et les massacres perpétrés un peu partout dans le monde entravent la préservation des différentes espèces.

La pêche du requin pour ses ailerons met en péril sa survie, mais les causes sont malheureusement plus diverses : surpêche, chasses préventives pour protéger les côtes, pollution, etc.

Sans jamais s’ériger en donneur de leçon, François Sarano établit un état des lieux inquiétant. Toutefois, le titre du dernier chapitre d’Au nom des requins s’intitule Réconciliation…

Un livre illustré par des croquis, photos et vidéos

Le livre de François Sarano est exemplaire sur le fond comme sur la forme. Au nom des requins est ponctué de croquis, illustration et photos. Vous y trouverez aussi des codes-barres qui vous renvoient à des vidéos illustrant son propos.

Ce livre est un véritable bijou à lire, à partager et à offrir. Il a d’ailleurs été récompensé par le Goncourt des animaux, prix 30 millions d’Amis dans la catégorie Essai.